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Développement Professionnel Continu

8 décembre 2023
Cette page présente des modèles et théories axés sur le développement professionnel continu, l’apprentissage autodirigé, et l’amélioration des compétences professionnelles (liste non-exhaustive).

La compétence, largement utilisée aujourd’hui dans des contextes aussi variés que les activités quotidiennes et les situations professionnelles stratégiques, a considérablement évolué au cours des dernières décennies. Cette notion, autrefois limitée à des aptitudes spécifiques comme la conduite ou la cuisine, s’est étendue pour englober des capacités plus complexes et cruciales dans divers milieux professionnels. Cette expansion reflète les changements significatifs survenus dans les structures organisationnelles et souligne l’importance accrue de la qualification et de la performance dans le monde du travail moderne (Coulet, 2011). Le concept de compétences, un sujet largement exploré dans de nombreuses études, est devenu un élément clé dans la création d’outils pédagogiques et professionnels.

Historiquement, la compétence a connu un essor majeur, passant d’une simple référence à des aptitudes spécifiques à une notion plus complexe et stratégique. Elle englobe désormais une variété de capacités indispensables, reflétant les mutations organisationnelles et les nouvelles exigences du monde professionnel. Avec ces changements, la compétence s’est progressivement dissociée de la notion traditionnelle de qualification, s’accompagnant d’une responsabilisation accrue des employés. Les travailleurs sont désormais évalués non seulement sur leurs compétences actuelles mais aussi sur leur capacité à acquérir et améliorer de nouvelles compétences pour renforcer leur employabilité (Coulet, 2011).

Dans les années 90, la France a introduit le bilan de compétences, une démarche visant à optimiser l’employabilité. Cette initiative a reflété une tendance plus large à valoriser et développer les compétences individuelles, tant pour l’accès à l’emploi que pour la mobilité professionnelle et la gestion de carrière. Parallèlement, le secteur de l’éducation et de la formation a également intégré la notion de compétence. Les objectifs pédagogiques et les programmes d’enseignement se sont progressivement centrés autour de cette notion, réorientant les méthodes d’évaluation et de formation vers une approche plus centrée sur les compétences (Coulet, 2011).

La littérature sur la compétence offre une pluralité de définitions, reflétant des conceptions variées issues de différentes disciplines. Ces diverses perspectives suggèrent l’existence de modèles théoriques parfois divergents, chacun proposant une perspective unique sur les processus intra-individuels liés à l’expression et l’élaboration des compétences. Ces définitions oscillent entre une dimension cognitive/technique et une dimension sociale/affective, soulignant les différentes approches dans la compréhension de la compétence, oscillant entre une interprétation axée sur les capacités individuelles et une vision mettant en avant les aspects sociaux et interpersonnels (Coulet, 2011).

  • Philippe Carré et Pierre Caspar, avec la contribution de Sandra Bélier, définissent la compétence comme la capacité à agir efficacement et à résoudre des problèmes professionnels dans un contexte spécifique, en intégrant diverses aptitudes. Bélier propose une analyse comparative de cinq approches des compétences, englobant les savoirs, les savoir-faire, les comportements, le savoir-être, leur intégration et les compétences cognitives.
  • Guy Le Boterf, lui, interprète la compétence comme l’aptitude à mobiliser ou activer divers savoirs dans un contexte donné. Il distingue divers types de compétences, allant des connaissances théoriques et procédurales aux compétences expérientielles, sociales et cognitives.
  • La classification de Kartz, plus ancienne, segmente les compétences en trois catégories : conceptuelles, techniques et humaines, correspondant à un découpage classique des savoirs, savoir-faire et savoir-être.
  • Des auteurs comme Samurcay et Pastre considèrent la compétence comme le lien entre l’individu et les situations de travail, expliquant la performance par l’organisation des connaissances acquises dans et pour le travail. Ces compétences, à la fois explicites et tacites, sont finalisées et opérationnelles.
  • Marc de Romainville oppose deux visions de la compétence : l’une béhavioriste, synonyme de conduites ou comportements structurés, et l’autre comme une capacité générative intérieure. Nicole Tremblay, en examinant l’autodidaxie, identifie quatre compétences clés : adaptative, sociale, praxique et métacognitive.
  • Dans les travaux de Jacques Delors, la compétence est envisagée dans un cadre de formation professionnelle, s’écartant de la qualification professionnelle traditionnelle au profit d’un « cocktail» personnel combinant qualifications, comportements sociaux, aptitudes au travail d’équipe et capacités d’initiative.
  • Guir et Bessière définissent sept « nouvelles » compétences pour les personnes formatrices, couvrant des domaines variés comme l’organisation, la communication, ainsi que les compétences technologiques et psychopédagogiques.
  • Marie-Josée Barbot et Giovanni Camatarri catégorisent les compétences de l’enseignant en cinq familles, allant de l’analyse du contexte socio-culturel aux compétences psychologiques et pédagogiques, en incluant les compétences méta-cognitives et sémiotiques.
  • Le groupe de recherche INRP (Institut National de Recherche Pédagogique) de l’IUFM (Instituts Universitaires de Formation des Maîtres) de Bourgogne propose un ensemble de compétences en TIC (Technologies de l’Information et de la Communication) pour les personnes enseignantes, mettant l’accent sur des capacités telles que la recherche efficace, la création de documents composites et la maîtrise des outils multimédias.
  • Arnaud Coulon et Frédéric Haeuw, étudiant des dispositifs tels que les A.P.P. (Approche Par Problèmes) et Miriad, identifient trois niveaux de compétences et d’action pour la personne formatrice, englobant le contexte économique, social et culturel, la mise en œuvre de projets pédagogiques et la gestion de dispositifs d’autoformation. Ils soulignent également l’importance de la maîtrise des N.T.I.C. (Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication), de la construction de partenariats et de la communication efficace.

La définition temporaire de Jonnaert (2017)

  • Une compétence se construit par des personnes en situations. Une compétence caractérise dès lors un moment particulier, celui de l’harmonie entre ces personnes et ces situations, le moment qui leur permet d’affirmer que leurs actions dans ces situations sont viables à cet instant.
  • Cette viabilité est précaire et peut à tout instant de l’échelle temporelle longue du développement d’une compétence, être remise en cause, notamment par la vigilance éthique. La viabilité d’une compétence est mise à l’épreuve des situations et peut être contestée. Dans ce cas, la compétence nécessite des adaptations, une reconstruction voire même une réfutation. C’est la fonction même de la vigilance éthique que d’exercer à chaque instant du processus de développement d’une compétence, une analyse critique des actions et de leurs résultats comme du choix des ressources tout autant que celui d’entrer en action dans telle ou telle situation.
  • En ce sens, une compétence est rarement stabilisée une fois pour toutes. C’est pourquoi également une compétence est peu prédictible et difficilement circonscrite dans une définition.
  • Une compétence est le résultat d’actions temporairement achevéestemporairement viables, toujours susceptibles d’être remises sur l’établi et sans cesse remises en question par une nécessaire vigilance éthique.

La compétence implique souvent une évaluation sociale, où les performances individuelles sont jugées selon des normes établies. Cette approche souligne l’importance du jugement social dans la définition de la compétence, révélant son aspect relationnel et contextuel. La notion de compétence reflète divers a-priori philosophiques, allant des approches innéistes à celles empiristes. Ces perspectives influencent la manière dont les compétences sont perçues, développées et évaluées, mettant en lumière les diverses facettes de cette notion complexe (Coulet, 2011).

Dans la pratique, les modèles de compétence tels que « savoirs, savoir-faire et savoir-être » dominent. Cependant, ces modèles tendent souvent à simplifier la nature dynamique des compétences, suggérant la nécessité d’approches plus nuancées et intégrées. La compétence est souvent vue comme une capacité d’exécution finalisée, liée à l’action et au contexte. Cette perspective met l’accent sur la coordination et l’intégration des différentes connaissances et habiletés dans un cadre opérationnel spécifique (Coulet, 2011).

Divers courants de recherche en psychologie offrent des cadres théoriques pour comprendre la compétence. Ces approches enrichissent la compréhension de la compétence, en mettant en avant les processus cognitifs et sociaux qui sous-tendent les performances individuelles et collectives (Coulet, 2011).

Deux exemples de modèles :

MADDEC (Modèle d’Analyse Dynamique pour la Description et l’Évaluation des Compétences) : Le modèle MADDEC (Modèle d’Analyse Dynamique pour la Description et l’Évaluation des Compétences) est une approche théorique visant à analyser et évaluer les compétences de manière systématique. Il se concentre sur l’organisation dynamique de l’activité, la régulation proactive et rétroactive, et la distinction entre activité productive et constructive. Ce modèle permet une compréhension approfondie des compétences en tant que processus évolutifs, intégrant divers éléments tels que les invariants opératoires, les inférences, les règles d’action, et les anticipations. Il offre ainsi un cadre structuré pour la formation, l’évaluation et le développement des compétences professionnelles.

MADIC (Modèle d’Aide au Développement Individuel des Compétences) : Le Modèle d’Aide au Développement Individuel des Compétences (MADIC) est un cadre théorique pour le tutorat qui guide le développement des compétences. Il se base sur l’interaction entre le tuteur et l’apprenant, focalisant sur la manière dont le tuteur peut soutenir et réguler l’apprentissage. Ce modèle prend en compte différentes composantes de la compétence et utilise des stratégies ciblées pour leur développement, en incluant des interventions spécifiques sur les tâches, les situations, et les outils d’apprentissage. MADIC vise à optimiser l’efficacité du tutorat en adaptant l’accompagnement aux besoins individuels de la personne apprenante.

Références

Coulet, J. (2011). La notion de compétence : Un modèle pour décrire, évaluer et développer les compétences. Le travail humain, 74(1), 1‑30. https://doi.org/10.3917/th.741.0001

Jonnaert, P. (2017, 1 juillet). La notion de compétence : une réflexion toujours inachevée. https://journals.openedition.org/ethiquepublique/2932

Pour aller plus loin sur la notion de compétences. (s. d.). Competise. Consulté le 10 décembre 2023, à l’adresse https://eduscol.education.fr/bd/competice/superieur/competice/boite/pdf/t1.pdf

Le Continuing Professional Development (CPD), ou le Développement Professionnel Continu (DPC) en français, est un processus d’apprentissage continu destiné à aider les personnes professionnelles à maintenir et à améliorer leurs compétences et connaissances tout au long de leur carrière. Cette pratique est essentielle pour rester compétent et efficace dans un environnement professionnel en constante évolution.

Inspiré par les travaux de Peter Jarvis, une figure de proue dans le domaine de l’éducation des adultes, ce processus englobe diverses méthodes d’apprentissage, telles que la formation formelle, les ateliers, les conférences, l’apprentissage en ligne, le travail collaboratif, la recherche et même l’auto-apprentissage.

Le DPC est fondé sur le principe de l’apprentissage tout au long de la vie. Il reconnaît que l’apprentissage ne se limite pas à la formation initiale, mais est un processus continu qui contribue à la croissance personnelle et professionnelle. L’objectif du DPC est de garantir que les personnes professionnelles restent à jour avec les dernières tendances, compétences, et connaissances nécessaires pour réussir dans leur domaine. Cela est particulièrement important dans des domaines en rapide évolution, comme la technologie, la médecine, l’éducation, et le droit.

  1. Apprentissage Basé sur la Pratique : Conformément à la théorie de Jarvis dans « The Practitioner-Researcher: Developing Theory from Practice », le DPC doit être ancré dans les expériences réelles des personnes professionnelles (Jarvis, 1999). La pratique professionnelle offre de nombreuses occasions de questionner, tester et réviser les théories, rendant l’apprentissage pertinent et immédiatement applicable.
  2. Principes de l’Éducation des Adultes : Dans son ouvrage « Adult Education and Lifelong Learning: Theory and Practice », Jarvis présente des principes fondamentaux pour l’éducation des adultes, qui peuvent être intégrés dans le DPC (Jarvis, 2004). Cela comprend la reconnaissance de la diversité des personnes apprenantes adultes, la compréhension de leurs motivations et la création d’environnements d’apprentissage qui favorisent l’autonomie et l’auto-direction.
  3. Développement Continu et Réflexion : Jarvis met en lumière l’importance de la réflexion continue et de l’auto-évaluation dans l’apprentissage des adultes. Le DPC doit encourager les personnes professionnelles à réfléchir régulièrement sur leur pratique, à identifier les domaines de croissance potentiels et à intégrer de nouvelles connaissances et compétences de manière significative (Jarvis, 2004).
  4. Adaptabilité et Changement : En se basant sur « Adult and Continuing Education: Theory and Practice », le CPD devrait être flexible et adaptable, répondant aux besoins changeants des personnes professionnelles et aux évolutions du secteur (Jarvis, 2004). Cela implique une mise à jour constante des programmes de DPC pour rester pertinents et efficaces.

En intégrant ces éléments, le modèle de DPC s’aligne sur les principes de l’éducation des adultes et met l’accent sur un apprentissage significatif et applicable dans la pratique professionnelle. Ce modèle reconnaît que le développement professionnel est un processus continu, façonné par l’expérience, la réflexion et l’adaptation aux changements.

Pour les professionnelles ayant des responsabilités de formation, le DPC est crucial pour développer des compétences pédagogiques, rester informé des dernières recherches en éducation, et intégrer de nouvelles technologies et méthodologies dans leurs formations. Le DPC peut prendre la forme de participation à des séminaires, de l’obtention de certifications supplémentaires, de l’engagement dans des projets de recherche, ou même de la contribution à des communautés professionnelles d’apprentissage.

Par exemple, dans le secteur de la technologie, le DPC peut impliquer l’apprentissage de nouveaux langages de programmation ou de systèmes de gestion de base de données, tandis que dans le domaine médical, il peut consister en la mise à jour des connaissances sur les dernières découvertes médicales ou les avancées en matière de soins aux patients.

Aussi, le DPC assure que le corps formateur reste compétent dans son domaine. En encourageant et en facilitant le DPC, les personnes professionnelles ayant des responsabilités de formation peuvent contribuer à créer un environnement d’apprentissage dynamique et à jour, où le corps formateur est bien équipé pour répondre aux besoins changeants des personnes apprenantes. Le DPC aide également à promouvoir une culture d’apprentissage continu dans le milieu professionnel, ce qui est essentiel pour l’innovation et l’amélioration continue dans la formation.

Enfin, l’impact du DPC s’étend au-delà du développement individuel; il influence également la formulation des politiques éducatives et professionnelles. Par exemple, l’intégration de normes de DPC dans les politiques publiques peut garantir que les personnes professionnelles dans des domaines critiques restent compétents et conformes aux normes en vigueur, ce qui est essentiel pour la sécurité publique, l’innovation, et le progrès économique.

Référence

Jarvis, P. (1999). The Practitioner-Researcher: Developing Theory from Practice. https://eric.ed.gov/?id=ED423812 Jarvis, P. (2004). Adult Education and Lifelong Learning: Theory and Practice (3rd ed.). Routledge. https://epale.ec.europa.eu/sites/default/files/adult_education_and_lifelong_learning.pdf

La pratique réflexive est un processus essentiel où les professionnels évaluent et analysent de manière critique leurs actions et décisions. Ce concept, ancré dans les travaux influents de Donald Schön, notamment son ouvrage « The Reflective Practitioner », met en lumière l’importance de l’apprentissage tiré de l’expérience (Schön, 1983). Ce processus implique une réflexion approfondie et critique sur les actions et les expériences vécues, ce qui permet aux individus d’apprendre de leurs pratiques et de les améliorer de manière continue

Dans le domaine de l’éducation, la pratique réflexive est particulièrement pertinente. Elle permet aux corps enseignant et formateur de réfléchir sur leurs enseignements de manière approfondie, d’identifier clairement les domaines nécessitant une amélioration, et d’ajuster leurs méthodes pédagogiques pour mieux répondre aux besoins diversifiés de leurs personnes apprenantes. Ce processus peut inclure une analyse détaillée d’une leçon spécifique, une évaluation minutieuse des réactions des personnes étudiantes, ou une réflexion critique sur les méthodes pédagogiques employées et les résultats d’apprentissage obtenus.

Les modèles de pratique réflexive, tels que le modèle de réflexion de Gibbs (1988), offrent une structure pour guider cette réflexion. Le modèle de Gibbs propose un cycle comprenant six étapes : description, sentiments, évaluation, analyse, conclusion, et plan d’action (Gibbs, 1988). Ces étapes aident à structurer la réflexion de manière à la rendre systématique et fructueuse.

Outre le modèle de Gibbs, d’autres cadres, tels que le modèle de réflexion de Kolb (1984), mettent l’accent sur l’apprentissage expérientiel et la transformation de l’expérience en connaissances (Kolb, 1984).

La pratique réflexive n’est pas uniquement une activité solitaire ; elle peut également être réalisée de manière collaborative. Les groupes de réflexion offrent un espace pour le partage d’expériences et une réflexion collective, enrichissant la compréhension et la perspective de chacun. Cette approche collaborative est particulièrement bénéfique dans les environnements professionnels où le partage de connaissances et d’expériences diverses peut stimuler l’innovation et l’amélioration des pratiques.

Pour les personnes professionnelles ayant des responsabilités de formation, encourager la pratique réflexive est essentiel pour promouvoir un développement professionnel efficace et une amélioration qualitative de la formation. En intégrant la pratique réflexive dans les programmes de formation et de développement professionnel (Moon, 2004), ils jouent un rôle crucial dans l’aide apportée au corps enseignant pour devenir plus conscient de sa pratique pédagogique, identifier les opportunités d’innovation et d’amélioration, et s’adapter de manière proactive aux défis de la formation.

Références

Gibbs, G. (1988). Learning by Doing: A Guide to Teaching and Learning Methods. Oxford Centre for Staff and Learning Development. https://thoughtsmostlyaboutlearning.files.wordpress.com/2015/12/learning-by-doing-graham-gibbs.pdf

Kolb, D. A. (1984). Experiential Learning: Experience as the Source of Learning and Development. Prentice-Hall. https://www.researchgate.net/publication/235701029_Experiential_Learning_Experience_As_The_Source_Of_Learning_And_Development

Moon, J. A. (2004). A Handbook of Reflective and Experiential Learning: Theory and Practice. Routledge. https://www.taylorfrancis.com/books/edit/10.4324/9780203416150/handbook-reflective-experiential-learning-jennifer-moon Schön, D. A. (1983). The reflective practitioner: How professionals think in action. Basic Books.  https://www.amazon.com/Reflective-Practitioner-Professionals-Think- Action/dp/0465068782

L’organisation apprenante, ou « Learning Organization », est un concept développé par Peter Senge dans son ouvrage « The Fifth Discipline » (Senge, 1990). Ce modèle théorique décrit une organisation qui facilite l’apprentissage de tous ses membres qui se transforme continuellement pour répondre aux défis et aux opportunités.

Senge (1990) identifie cinq disciplines qui sont essentielles à la création d’une organisation apprenante : la maîtrise personnelle, les modèles mentaux, la vision partagée, l’apprentissage en équipe, et la pensée systémique, cette dernière étant la discipline intégratrice qui lie toutes les autres:

  1. La maîtrise personnelle : Cette discipline se concentre sur le développement personnel continu des individus au sein de l’organisation. Elle encourage les membres à clarifier et à approfondir leurs objectifs personnels, à se concentrer sur leurs capacités d’apprentissage et à travailler continuellement à l’amélioration de soi (Senge, 1990). Cela crée une culture où les employés sont motivés à atteindre non seulement les objectifs de l’organisation, mais aussi leurs propres buts personnels.
  2. Les modèles mentaux : Les modèles mentaux se réfèrent aux croyances, valeurs et préjugés internes que les individus portent inconsciemment. Cette discipline implique de remettre en question ces modèles mentaux, de les rendre explicites et de les ouvrir à l’examen et à la discussion. Il s’agit de comprendre comment ces croyances influencent nos actions et nos décisions, et de les modifier si nécessaire pour créer une pensée plus ouverte et plus adaptative (Senge, 1990).
  3. La vision partagée : La création d’une vision partagée au sein d’une organisation implique le développement d’un ensemble de buts et d’objectifs communs que tous les membres partagent et vers lesquels ils travaillent ensemble. Cette vision commune aide à motiver et à guider les membres de l’organisation, créant un sentiment d’appartenance et de but collectif (Senge, 1990).
  4. L’apprentissage en équipe : L’apprentissage en équipe se concentre sur l’amélioration de la capacité des équipes à dialoguer, à penser ensemble et à apprendre collectivement. Cela implique de développer des compétences telles que la communication ouverte, la résolution de conflits et la collaboration. L’apprentissage en équipe permet de tirer parti des perspectives et expériences diverses des membres, conduisant à des solutions plus innovantes et efficaces (Senge, 1990).
  5. La pensée systémique : La pensée systémique, considérée comme la cinquième et la plus cruciale des disciplines, est la capacité de voir les interrelations plutôt que des chaînes linéaires de cause à effet. Cela signifie comprendre comment les actions dans une partie de l’organisation peuvent avoir des effets dans une autre partie, et comment les problèmes sont souvent interdépendants. La pensée systémique aide à voir les problèmes et solutions dans le contexte global de l’organisation, plutôt que comme des problèmes isolés (Senge, 1990).

Dans le contexte de la formation, le concept d’organisation apprenante est particulièrement pertinent. Les établissements qui adoptent cette approche encouragent un apprentissage continu et collaboratif parmi leur personnel, favorisant ainsi un environnement où l’innovation pédagogique et l’amélioration continue sont la norme. Cela implique non seulement de développer les compétences individuelles des corps enseignant et formateur, mais aussi de cultiver une culture organisationnelle qui valorise le partage des connaissances, la réflexion critique, et l’adaptation aux changements.

Pour une personne professionnelle ayant des responsabilités de formation, promouvoir les principes de l’organisation apprenante peut transformer la manière dont la formation est abordée (Smith, 2001). Cela implique de créer des structures et des processus qui encouragent la réflexion collective, le partage des meilleures pratiques, et l’expérimentation pédagogique.

Références

Senge, P. M. (1990). The Fifth Discipline: The Art & Practice of The Learning Organization. Currency Doubleday.  http://www.seeing-everything-in-a-new-way.com/uploads/2/8/5/1/28516163/peter-senge-the-fifth-discipline.pdf

Smith, M. K. (2013, 4 février). Peter Senge and the learning organization – Infed.org : infed.org. https://infed.org/mobi/peter-senge-and-the-learning-organization/

Le modèle de Schön sur la réflexion dans l’action est une théorie influente dans le domaine de l’éducation et de la formation professionnelle. Développé par Donald Schön dans son ouvrage ‘The Reflective Practitioner’ (Schön, 1983), ce modèle met en lumière l’importance de la réflexion pour les spécialoistes pendant l’exercice de leur activité.

Selon Schön (1983), la réflexion dans l’action se produit en temps réel, lorsque les professionnels et professionnelles rencontrent des situations imprévues ou uniques et doivent penser et agir simultanément pour résoudre le problème. Cela implique une analyse et une adaptation rapides des stratégies en fonction de la situation.

La réflexion dans l’action est particulièrement pertinente pour les spécialistes confrontés à des situations complexes et changeantes, où les solutions standard ne sont pas toujours applicables (Schön, 1983). Dans ces cas, ils doivent s’appuyer sur leur expérience, leur intuition et leur jugement pour prendre des décisions et ajuster leurs actions. Ce processus de réflexion permet non seulement de résoudre des problèmes spécifiques, mais contribue également à l’apprentissage et au développement professionnel continu.

Le modèle de Schön, axé sur la « Réflexion dans l’action », peut être appliqué dans la conception d’expériences d’apprentissage et de développement professionnel en encourageant les personnes apprenantes à réfléchir activement pendant le processus d’apprentissage. Cela implique l’intégration de la réflexion dans les activités d’enseignement, comme les discussions en classe et les journaux de réflexion (Schön, 1983).

Les opportunités pour l’apprentissage expérientiel, telles que les simulations et les études de cas, permettent aux personnes apprenantes de mettre en pratique leurs connaissances dans des situations réelles ou simulées. L’autoréflexion est encouragée pour développer une compréhension personnelle des processus d’apprentissage. Le corps enseignant joue un rôle clé en modélisant la réflexion dans l’action et en fournissant des retours immédiats (Schön, 1983).

Pour les personnes professionnelles ayant des responsablités de formation, intégrer le modèle de Schön dans les programmes de développement professionnel peut grandement bénéficier aux corps enseignant et formateur. Cela implique de les encourager à réfléchir activement pendant leur formation, à reconnaître et à analyser les situations imprévues, et à adapter leurs méthodes en conséquence (Schön, 1983).

Référence

Schön, D. A. (1983). The Reflective Practitioner: How Professionals Think in Action. Basic Books. https://rauterberg.employee.id.tue.nl/lecturenotes/DDM110%20CAS/Schoen-1983%20Reflective%20Practitioner.pdf

Le modèle d’évaluation et de changement de Thomas Guskey offre un cadre important dans le domaine de l’éducation. Ce modèle se concentre sur l’évaluation des programmes de développement professionnel et leur impact sur l’enseignement et l’apprentissage (Guskey, 2000).

Ce modèle propose une approche en cinq niveaux pour évaluer l’efficacité des programmes de développement professionnel (Guskey, 2000). Ces niveaux sont conçus pour aider le corps enseignant, ainsi que les cadres administratifs, à comprendre comment et pourquoi un programme de développement professionnel influence ou non l’enseignement et l’apprentissage :

  1. Le premier niveau évalue les réactions des personnes apprenantes. Il mesure leur satisfaction immédiate envers le programme de formation (Guskey, 2000). Malgré des critiques sur sa superficialité, ce niveau est essentiel pour anticiper l’engagement futur des groupes participants.
  2. Le deuxième niveau se concentre sur l’apprentissage des personnes participantes. Il évalue l’acquisition des connaissances, compétences et attitudes visées par le programme (Guskey, 2000).
  3. Le troisième niveau examine le soutien organisationnel. Il évalue dans quelle mesure l’organisation facilite l’application des nouvelles compétences ou connaissances (Guskey, 2000).
  4. Le quatrième niveau mesure l’utilisation des nouvelles connaissances et compétences dans la pratique professionnelle (Guskey, 2000).
  5. Le cinquième niveau évalue l’impact du développement professionnel sur les performances et résultats d’apprentissage des personnes apprenantes (Guskey, 2000).

Pour une personne professionnelle ayant des responsabilités de formation, le modèle de Guskey offre un cadre structuré pour évaluer et améliorer les programmes de développement professionnel. Ce modèle permet d’identifier les forces et faiblesses des programmes. Il aide à ajuster les stratégies de formation pour répondre aux besoins du corps enseignant. Ainsi, il améliore l’impact de la formation sur l’apprentissage des personnes participantes. Guskey (2000) souligne l’importance d’une évaluation complète qui va au-delà de la satisfaction immédiate pour inclure des changements à long terme dans la pratique pédagogique et les résultats des perosnnes apprenantes.

Références

Guskey, T. R. (2000). Evaluating Professional Development. Corwin Press. https://books.google.ca/books/about/Evaluating_Professional_Development.html?id=CklqX4zgDtgC&redir_esc=y

Guskey, T. R. (2002.). Does It Make a Difference ? Evaluating Professional Development. Educational leadership. p.44-51.

https://tguskey.com/wp-content/uploads/Professional-Learning-4-Evaluating-Professional-Development.pdf

Le modèle de Fuller et Brown sur la croissance professionnelle du corps enseignant offre un cadre théorique important. Développé dans les années 1970 par Frances Fuller et Oliver Brown, ce modèle est fréquemment utilisé dans les études sur la formation et le développement professionnel des enseignants (Fuller & Brown, 1975). Il décrit les phases variées de préoccupations et de croissance professionnelle des enseignants, particulièrement durant leurs premières années de pratique.

Selon ce modèle, le corps enseignant passe par différentes phases de préoccupations et de croissance professionnelle au cours de leur carrière. Ces phases reflètent un changement progressif dans les préoccupations du corps enseignant, allant des préoccupations centrées sur soi à des préoccupations plus centrées sur les personnes apprenantes et l’enseignement efficace (Fuller & Brown, 1975) :

  • Préoccupations centrées sur soi : Dans les premières étapes de sa carrière, le corps enseignant est souvent préoccupé par des questions de survie personnelle, telles que la gestion de la classe, la maîtrise du contenu et la satisfaction des attentes institutionnelles.
  • Préoccupations centrées sur les tâches : À mesure qu’il gagne en confiance, le corps enseignant commence à se concentrer sur les aspects plus techniques de l’enseignement, comme les méthodes pédagogiques et l’efficacité des leçons.
  • Préoccupations centrées sur l’impact : Dans les phases ultérieures, le corps enseignant se concentre davantage sur l’impact de leur enseignement sur les personnes apprenantes, en se préoccupant de la manière dont il peut améliorer leur apprentissage et compréhension.

Pour une personne professionnelle ayant des responsabilités de formation, comprendre ce modèle est essentiel pour concevoir des programmes de développement professionnel adaptés aux différents stades de la carrière des membres de la communauté (Fuller & Brown, 1975). Cela implique de reconnaître que leurs besoins et préoccupations évoluent avec le temps et que le soutien et la formation doivent être adaptés en conséquence pour favoriser une croissance professionnelle continue.

Référence

Fuller, F., & Brown, O. (1975). Becoming a Teacher. Teacher Education: Seventy-Fourth Yearbook of the National Society for the Study of Education. Chicago: University of Chicago Press. https://archive.org/details/teachereducation0000kevi_q5e8

Auxiliaires de recherche

La recherche et la synthèse ont été réalisées par

Vincent Comlan Gomez
Vincent Comlan GomezRecherche et rédaction
Vénunyé Claude KONDO TOKPOVI
Vénunyé Claude Kondo TokpoviRecherche et rédaction
Evarice Benoit
Evarice Benoit DjieufackRecherche et rédaction

Subvention

Ce projet est subventionné par le ministère de l’Économie et de l’Innovation, d’un montant de 300 000 $, dans le cadre du programme NovaScience volet 2B : Soutien aux initiatives de formation en intelligence artificielle (IA). Le coût total du projet est estimé à 400 000 $.

CHUM
Observatoire international sur les impacts sociétaux de l'IA et du numérique
Gouvernement du Québec