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IA générative et personnes étudiantes : comment en tirer le meilleur parti ?

7 mars 2025

L’avènement de l’intelligence artificielle générative (IAG) ne cesse nolens volens d’affecter nos vies au quotidien et illustre à quel point nos sociétés sont dans un processus d’accélération de l’innovation technologique. L’IAG désigne un type de système d’intelligence artificielle capable de générer très rapidement du contenu (textes, images, vidéos) en réponse à la demande d’une personne utilisatrice. Pensons, par exemple, aux agents conversationnels tels que ChatGPT, Gemini ou Copilot lorsqu’on souhaite générer un contenu textuel. Cette technologie de l’IAG exerce son pouvoir transformationnel dans différents domaines de la société et celui de l’enseignement supérieur ne fait pas exception. On a pu ainsi montrer qu’elle transforme le rôle des enseignants, redéfinit la nature de l’apprentissage et remodèle l’infrastructure éducative. Face à cette nouvelle technologie, de nombreux établissements d’enseignement supérieur (EES) ont adopté une posture d’ouverture en encourageant son usage selon leurs principes directeurs et leur Règlement disciplinaire. C’est le cas par exemple de l’Université Laval. Cependant, malgré l’adoption de ces mesures, des voix de personnes enseignantes continuent de s’élever pour exprimer des préoccupations relatives aux retombées négatives de l’IAG sur l’enseignement supérieur. Contre toutes attentes, les voix des personnes étudiantes semblent plutôt nuancées.

La posture des personnes étudiantes face à l’IAG

En adoptant des lignes directrices promouvant l’ouverture face à l’IAG, les établissements d’enseignement supérieur ont contribué à favoriser l’usage de cette technologie par les personnes étudiantes. En effet, selon des spécialistes, une bonne part de la population étudiante utilise souvent l’IAG à l’université afin de répondre à divers besoins : mieux définir des concepts, mieux comprendre les cours et résoudre des exercices. Dans ce sens, de nombreuses personnes étudiantes font usage de cette technologie car elles ont une perception favorable à l’égard de cette dernière. Elles soulignent, par exemple, l’efficacité et l’acceptabilité des chatbots en tant que tuteurs de cours.

Les bénéfices de l’IAG pour les personnes étudiantes

Les personnes étudiantes, utilisant la technologie de l’IAG dans le cadre universitaire, considèrent qu’elle leur offre des apprentissages personnalisés et inclusifs. D’abord, l’IAG leur offre une aide à la rédaction à travers la correction syntaxique, la traduction dans d’autres langues et la synthèse de textes. Ensuite, l’IAG les assiste en matière de recherche en leur permettant d’avoir accès à une importante quantité d’informations sur divers sujets. Enfin, l’IAG leur offre son aide à l’étude. Par exemple, elle planifie, à leur profit, des horaires d’étude adaptés, leur propose un tutorat ou des parcours d’apprentissage personnalisés, et leur génère des questions de révision à l’aide de quizz, de flashcards, etc. En clair, les personnes étudiants considèrent que l’IAG leur est utile car elle présente des atouts en termes d’« explication », de « rapidité » et de « facilité » au sens de simplicité d’utilisation. Toutefois, à l’image de tout outil, l’usage de l’IAG par les personnes étudiantes n’est pas sans risques.

Les risques de l’usage de l’IAG pour les personnes étudiantes

L’usage de la technologie de l’IA par les personnes étudiantes présente de nombreux risques pour ces dernières. Premièrement, l’IAG peut les conduire dans la mésinformation car elle peut générer parfois des contenus inexacts. Or, bon nombre de personnes étudiantes ne procèdent pas à la vérification de l’exactitude des réponses fournies par l’IAG. Deuxièmement, cette technologie peut présenter des risques concernant la protection des données personnelles des personnes étudiantes. En effet, ces dernières peuvent parfois partager des données sensibles avec les grands modèles de langage à travers les prompts. Dans ce cas, la sécurité de ces données peut être compromise en cas de dysfonctionnements techniques ou de cyberattaques de cette technologie. Troisièmement, l’IAG peut exposer les personnes étudiantes aux risques de plagiat et de non-respect des droits d’auteur. Quatrièmement, l’usage de l’IAG par les personnes étudiantes peut affecter négativement le développement de leurs compétences de pensée analytique nécessaires pour effectuer de la recherche et résoudre des problèmes.

Cinquièmement, les biais algorithmiques qui sont des erreurs systématiques dans les algorithmes d’IA peuvent avoir un impact négatif sur la diversité des savoirs en limitant l’accès à l’information et en renforçant les stéréotypes. Du reste, pour mitiger les risques liés à l’usage de la technologie de l’IAG et exploiter pleinement ses possibilités, le recours des personnes étudiantes à la pensée critique semble une avenue prometteuse.

Optimiser l’usage de l’IA grâce à la pensée critique

Face à la technologie de l’IAG qui a des effets cognitifs négatifs sur les personnes étudiantes, je pense que celles-ci peuvent et doivent, dans une démarche d’engagement personnel, poser des actions simples et concrètes afin de développer leur pensée critique. Cette dernière peut être définie comme un processus actif d’évaluation et de jugement d’un contenu ou d’une action, fondé sur des critères rationnels et logiques. Le développement de la pensée critique par les personnes étudiantes revêt une importance capitale parce qu’elle leur offre des outils pour identifier la mésinformation générée parfois par la technologie de l’IAG. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, les stratégies pour cultiver sa pensée critique est à la portée de toutes et de tous. Par exemple, lire plusieurs sources, participer à des débats ou se poser des questions au sujet du contenu sont des exercices simples qui peuvent permettre aux personnes étudiantes de développer leur pensée critique. Par ailleurs, l’engagement personnel des personnes étudiantes n’exempte pas les personnes enseignantes de jouer leur partition en vue d’un usage optimisé de l’IAG au sein de la communauté universitaire.

Solutions complémentaires

L’IAG, a une capacité transformatrice dans l’enseignement supérieur en le rendant plus inclusif, accessible et personnalisé. Des actions peuvent donc être menées pour en faire un levier et non un talon d’Achille. Pour ce faire, au-delà du développement des compétences en littératie numérique et en pensée critique chez les personnes étudiantes, des évènements scientifiques visant à les sensibiliser aux enjeux de l’IAG pourraient être davantage mis en œuvre.

Ces solutions pourraient également s’étendre aux personnes enseignantes en leur fournissant des outils et ressources innovants et pertinents pour la conception d’expériences d’apprentissage adaptés grâce à l’IAG.

Enfin, et non des moindres, le point d’ancrage de ces solutions demeure la recherche. Le développent plus pousser d’études visant à comprendre les effets de l’IAG sur les personnes étudiantes et enseignantes s’avèreraient bénéfiques pour identifier les meilleures pratiques. C’est justement le sujet de ma recherche doctorale.

L’IAG représente à la foi un défi mais aussi une opportunité de transformation et d’adaptation dans l’enseignement supérieur. Néanmoins, il est crucial de se poser les bonnes questions. L’IAG marque-t-elle juste une rupture technologique ou s’inscrit-elle dans la continuité des avancées de l’IA?

Autrice