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Le virage numérique nécessite qu’on repense la formation et la requalification professionnelle des équipes de formation et de perfectionnement

5 février 2020

Aujourd’hui, la survie de nombreuses organisations dépend de leur intention d’utiliser les technologies de pointe dans le domaine de l’intelligence artificielle (IA) pour intégrer l’intelligence augmentée à leur milieu de travail.

Selon une récente étude d’IBM, 120 millions de travailleurs devront développer de nouvelles compétences ou même s’orienter vers de nouveaux emplois en raison des avancées de l’IA et de l’automatisation intelligente, et ce, au cours des trois prochaines années. Or, la moitié des organisations interrogées ont à peine commencé à revoir leurs stratégies de formation pour réagir à cette urgence.

Si elles veulent prendre le virage numérique avec succès, les organisations doivent éviter la dispendieuse stratégie de gestion des talents qui consiste à faire des embauches de personnel très coûteuses plutôt que de recycler leurs employés actuels.

À l’orée de 2020, elles doivent plutôt entreprendre une révolution pour requalifier leur personnel professionnel. Cette révolution mettra leurs employés au cœur de la transformation numérique et les positionnera comme des êtres humains aux capacités uniques, ce qui les aidera à collaborer avec les nouvelles technologies.

Il y a en effet un besoin criant d’approches novatrices et même perturbatrices pour la formation, et ces approches comportent plusieurs types d’apprentissages. La formation peut prendre différentes déclinaisons : formation réactive, adaptative, personnalisée, mobile, autodirigée, collaborative ou sociale, autoformation, formation sur demande ou encore apprentissage par l’expérience. Certaines formations doivent être disponibles au moment où les employés en ont besoin comme les formations juste à temps ou l’apprentissage qui survient pendant le déroulement du travail.

Certaines de ces méthodes de formation reposent sur l’apprentissage par le jeu ou la ludification et sur les technologies émergentes comme la simulation, la réalité augmentée, la réalité virtuelle, la réalité mixte ou la réalité croisée, pour n’en nommer que quelques-unes.

Mais ceux qui aident à faire avancer la « révolution en matière de requalification professionnelle » répondent-ils aux besoins futurs ?

Équipes de formation et de perfectionnement

Les experts en formation aideront les futurs travailleurs à s’adapter aux inévitables changements numériques. Les équipes de formation et de perfectionnement peuvent compter parmi elles des concepteurs pédagogiques ou ingénieurs pédagogiques, des technopédagogues, des conseillers pédagogiques, des experts en technologie éducative, des experts en développement de talent et d’organisation, des spécialistes en formation et des consultants de la performance humaine. Quel que soit leur titre, ces spécialistes seront en première ligne pour montrer aux travailleurs comment collaborer avec la technologie en vue d’améliorer la productivité et le rendement des affaires.

Or, les spécialistes doivent eux-mêmes traverser la transformation numérique sans savoir ce que l’avenir leur réserve. Ils ont eux aussi besoin de formation.

Nombreux sont ceux qui prédisent que l’IA aura des effets importants sur la technologie éducative. On s’attend à ce que sa présence dans le domaine de l’éducation augmente de 43 pour cent d’ici 2022.

Dans ce domaine, l’IA est appliquée au profilage et aux prédictions, aux évaluations, aux systèmes adaptatifs ainsi qu’à la personnalisation des systèmes d’apprentissage et des systèmes tutoriels intelligents.

Les chaînes de blocs, une autre technologie de rupture, pourraient être utilisées pour l’apprentissage tout au long de la vie et les itinéraires d’apprentissage global. L’apprentissage prend de plus en plus la forme d’un processus continu, et la technologie des chaînes de blocs peut documenter toutes les activités d’apprentissage et relier les dossiers scolaires de différents établissements.

L’application de cette technologie pourrait radicalement transformer le rôle des équipes de formation et de perfectionnement, qui devront notamment appliquer la science des données et l’analytique avancée à l’apprentissage organisationnel.

De façon générale, ces équipes sont responsables du développement des connaissances, des habiletés et des compétences des employés ainsi que de l’amélioration du bassin de talents d’une entreprise. Elles offrent aussi aux employés des occasions de croissance personnelle, ce qui contribue à leur engagement et à leur rétention.

Les responsabilités de ces équipes ont évolué. Elles doivent maintenant aider les travailleurs actuels et de demain à trouver leur place dans les milieux de travail de l’avenir. Elles doivent aussi composer avec la résistance au changement, qui peut provenir autant du haut que du bas de l’échelle.

Améliorer ses compétences tout au long de sa vie : une nécessité

Comme dans le cas des autres groupes qui doivent prendre le virage numérique, les équipes de formation et de perfectionnement doivent être capables de travailler de façon éthique, critique, responsable et durable avec les machines et les technologies émergentes.

En plus d’aptitudes techniques, les membres de ces équipes ont besoin de capacités dont seuls les humains disposent, par exemple cerner et résoudre des problèmes, négocier, motiver, convaincre et coordonner. Ils devront prendre des initiatives, avoir un esprit critique, être des collaborateurs et des communicateurs hors pair, faire preuve de curiosité, être créatifs et s’adapter. Ils devront, entre autres, avoir l’esprit ouvert, être sensibles aux questions de diversité et avoir de l’empathie.

Les fonctions traditionnelles des équipes de formation et de perfectionnement exigeaient autrefois un ensemble bien défini de connaissances et de compétences, mais il faut maintenant agirpour les aider à évoluer et à développer les compétences qui reflètent l’évolution de leur rôle.

Pour aider leur organisation à rester concurrentielle à l’ère du numérique, les professionnels de formation et du perfectionnement devront se réinventer. Ils doivent s’engager dans l’apprentissage tout au long de la vie pour étendre leurs compétences, développer de nouvelles capacités et mener le changement.

Ces équipes n’ont d’autre choix que d’entreprendre un processus de requalification, de réorientation et de perfectionnement de leurs compétences pour qu’elles puissent elles-mêmes identifier les meilleures stratégies de formation pour leur organisation.

Il y a toutefois des lacunes importantes dans la littérature concernant la formation, l’amélioration des compétences et l’apprentissage tout au long de la vie chez les experts déjà sur le terrain.

Une abondance d’information

En cette époque d’omniprésence de l’information, on retrouve des livres, des balados, des articles de magazine, des blogues et des webinaires en quantité industrielle. Certaines sources peuvent être consultées gratuitement, d’autres pas. Il faut apprendre à gérer cette masse d’information qui peut être déstabilisante, mais aussi savoir la filtrer.

Les conférences sont des occasions propices aux discussions, pour ceux qui peuvent se permettre d’y assister. Nombreux sont les professionnels de la formation et du perfectionnement qui participent à des conversations sur les médias sociaux pour tenter de garder le cap sur les tendances.

Mais ces stratégies pour rester à jour demeurent plutôt aléatoires, et n’ont pas fait l’objet d’études approfondies. Cette situation doit changer.

Comme l’a déjà dit Richard Branson, fondateur de Virgin Group : « Si vous prenez soin de vos employés, ils prendront soin de votre entreprise. »Nous renchérissons aujourd’hui en ajoutant que si vous prenez soin de vos équipes de formation et de perfectionnement, elles prendront soin de vos employés.

Pour réussir le virage numérique, chaque organisation devrait donner la priorité à l’amélioration des compétences et à la requalification professionnelle de son équipe de formation et de perfectionnement.

Autrices

Cet article a été publié dans La Conversation Canada par Nadia Naffi en collaboration avec Professeure Ann-Louise Davidson et Houda Jawhar de l’université Concordia